Samuel, un des personnages fictifs de mon dernier roman "OTSAR" s'est retrouvé dans le"Train fantôme".
Voici la véritable histoire de ce triste convoi.
« Ils étaient vingt et cent, ils étaient des milliers/ Nus et maigres, tremblants, dans ces wagons plombés/ Qui déchiraient la nuit de leurs ongles battants/ Ils étaient des milliers, ils étaient vingt et cent… » Tout le monde garde en mémoire Nuit et brouillard, cette chanson que Jean Ferrat sortit en 1963 commémorant les victimes des camps de concentration nazis de la Seconde Guerre mondiale.
Ce que l’on sait moins, c’est que 19 ans plus tôt au cœur de l’été caniculaire de 1944, l’un des derniers convois de ce type est parti de la gare de marchandises Raynal de Toulouse pour arriver au camp de Dachau, en Allemagne… après un périple de 57 jours.
Alors que la France se libérait, que l’aviation alliée bombardait les gares et les voies ferrées, que les maquis faisaient sauter les ponts, et sabotaient les rails, on a baptisé ce train de « Train Fantôme » parce qu’il ne cessait d’apparaître, de disparaître, de se recomposer, de réapparaître. Il a une dimension éminemment terrible mais aussi mystérieuse.
À son départ le 3 juillet, le train compte 403 prisonniers du camp du Vernet d’Ariège, 150 de la maison d’arrêt de Saint-Michel et 25 femmes de la caserne Caffarelli.
Alors que le train doit filer vers Angoulême pour rallier Paris puis l’Allemagne, il est bloqué et doit revenir en arrière à Bordeaux où il s’arrête du 12 juillet au 9 août. Les hommes sont parqués à la synagogue et les femmes à la caserne Boudet. Certains, sont fusillés. Le convoi repart puis s’enfonce dans la vallée du Rhône.
Le 18, sous le cagnard vauclusien, exténués et assoiffés, les détenus doivent faire à pied un transbordement de la gare de Roquemaure à celle de Sorgues. Des civils leur apportent eau et nourriture pendant que des cheminots et des maquisards locaux en aident d’autres à fuir.
Le voyage ubuesque se poursuit toujours cahin-caha. Le 24 au soir à Dijon, alors que les officiers allemands, sentant l’arrivée des alliés, sont prêts à prendre le train, le chef du convoi refuse, préférant voir mourir ses compatriotes que de faillir aux ordres.
Sur les 750 déportés (chiffre aujourd’hui communément admis durant l’ensemble du trajet) du convoi, 536 « rescapés » seront immatriculés à leur arrivée à Dachau le 28 août 1944. Certains seront emportés six mois plus tard par le typhus dû à un surpeuplement du camp.
D’après un texte de Mathieu Arnal publié sur Actu Toulouse le 3 juin 2018
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